8.9.18

De sel, du riz et de la neurologie.

Discutons un peu (texte très court) du sel de table dans les troubles neurologiques et accessoirement de quelques méthodes pou en contrôler les apports chez tout le monde. 

Commençons par un truc que personne n'enseigne à la fac : l'atteinte du goût et de l'odorat dans les pathologies du système nerveux ou celles des ses annexes (communément appelé : le reste du corps humain). Le goût et l'odorat sont des sens archaïques. Archaïques en neurologie ça veut dire que c'est des sens pris en charges par des régions du cerveau déjà présentes chez les premiers organisme avec un système nerveux, il y'a des millions d'années (quelque part au moment où apparaissent les premières méduses).

La conséquence concrète de cet archaïsme, est que bien que ces sens soient peu développés chez l'humain (nous sommes ridicules par rapport à tous les autres animaux), ils sont reliés à des zones corticales capables de prendre le contrôle de nos comportements. 

Vous l'avez déjà tous expérimenté avec des aliments qui vous dégoûtent au point de vous en éloigner, ou qui vont fait recracher ce que vous avez mis dans la bouche, même si c'est pas très très gentil pour le cuisinier. etc... A l'inverse vous avez tous au moins une fois craqué dans une boulangerie en sentant l'odeur d'un gâteau ou celle d'une baguette chaude. 

Bref, le goût et l'odorat sont de puissants outils pour nous faire changer nos comportements. 

Mais il y'a plus.

Il y'a le fait que la perturbation d'un paramètre biologique ou physiologique peut aussi modifier la sensibilité de ces sens, et donc induire un comportement. 

Comme je sens que c'est un concept un peu compliqué, voilà quelques exemples : en cas d'hypoglycémie vous avez faim (de sucre), en cas de gros effort vous avez faim (de sel, le goût hyper salé des boissons d’effort est moins écoeurant)  etc...

Avec tout ce que je viens de vous dire, vous imaginez sans problème que si ces sens sont perturbés, votre comportement va se modifier et parfois devenir nocif. 

Dans pas mal de pathologies neurologiques, on a des atteintes du goût et de l'odorat. La plus caricaturale est la maladie de Parkinson. 

Bien avant l'apparition des troubles moteurs (tremblement, rigidité, akinésie) les patients avec une maladie de Parkinson ont une baisse de l'odorat et du goût. Ils développent une appétence pour les... exhausteurs de goût (sel, acide, gras, oignon, ail, piments, sauce soja...). Et comme en France, contrairement à la légende, on n’utilise pas tant d'ail et d'oignon que ça, la plupart du temps les patients consomment surtout beaucoup de sel et de gras. 

Beaucoup. 

Non seulement ils en consomment beaucoup, mais en ce qui concerne le sel, ils en ressentent un bienfait immédiat : ça leur évite les sensations de faiblesse mal systématisées....qui en fait le sont parfaitement, parce que la plupart du temps elles témoignent d'une hypotension orthostatique. En mangeant salé, ils diminuent au long cours la chute de tension quand ils se mettent debout (avec la sensation de tête qui tourne), et la baisse de tension liée à la dysautonomie post prandiale (grosse somnolence). 

Malheureusement, et c'est pas de bol, l'hypotension de la dysautonomie parkinsonienne n'est pas incompatible avec l'hypertension artérielle de base. Et manger gras et salé, n'est pas une super idée pour lutter contre l'hypertension artérielle et ses complications vasculaires.

Il faut donc réussir à lutter contre ces comportements, sauf que ces derniers étant, si vous vous souvenez du début de ce texte, archaïques, lutter contre eux est à peu prés aussi réaliste que de lutter contre le dégoût de manger une main de zombie décomposé. 

Du coup il faut biaiser. Il faut faire croire aux sens que vous avez fait le job et mangé gras et salé. Et ça c'est pas facile mais on y arrive.

Le principe de base est qu'il faut dé-couple (séparer) le goût d'un aliment, de sa quantité.  Prenons un exemple concret pour bien comprendre.
  • Cuisez un bol de riz vapeur sans rien ajouter. Un bol de riz blanc vapeur nature. 
  • C'est pas super bon.
  • Maintenant salez-le à votre goût en mesurant approximativement la quantité de sel nécessaire qu'il vous faut pour que ce soit moins mauvais (sans rien ajouter d'autre).
  • Recommencez l'expérience avec un nouveau bol. Prenez-en deux cuillères que vous mettez à part et salez ce qui reste avec un tiers du sel total utilisé précédemment. 
  • Mangez votre riz (qui du coup a 2/3 de sel en moins). C'est pas très bon mais ça passe.
  • Prenez maintenant les deux cuillères que vous avez mis de côté, et salez-les avec un autre tiers de sel.
  • Mangez. Avouez que c'est bon. Presque trop salé. Mais en tout cas vous n'avez pas envie de re manger salé, alors que vous avez utilisé un tiers de sel en moins.
  • Magique !
Vous pouvez renforcer l'effet en mettant du citron sur le riz, ou en buvant un verre de limonade avant de manger voter bol. 

Bon bref, plutôt que d'essayer de manger sans sel (ce que personne ne peut faire su la durée) essayez plutôt de faire comme les parkinsoniens. Vos artères et vos reins vous diront... rien parce qu’ils ne parlent pas. Mais le geste compte.