12.8.15

Dyskinésies, dystonies, chorées, ballisme d’apparition brutales



Où l'on parle de es mouvements anormaux par excès qui sont rares, très faciles à diagnostiquer et à traiter si vos souvenirs de clinique neurologique sont bons et votre interrogatoire correcte.


CAS 1 : DYSKINÉSIES CHEZ UN PATIENT PARKINSONIEN CONNU. 

Cas fréquent puisque... 100% des patients parkinsoniens présentent ce type de troubles après 10 ans de traitement. La dyskinésie est assez typique : c'est un excès de mouvement qui peut à l'extrême prendre un aspect de dystonie (membre fixé dans une position) ou de chorée (mouvements semblables à ceux d'une danse).

Il n'y a qu'une chose à retenir : sauf cas très particuliers trop rares pour en parler, les dyskinésies chez un patient parkinsonien sous traitement sont toujours secondaires à un surdosage médicamenteux.

 Le seul traitement consiste à attendre qu'elles passent toutes seules (il y a rarement besoin d'attendre plus de 4 heures en raison de la demi-vie courte des traitements). Ces 4 heures sont d'ailleurs un délais idéal pour joindre un neurologue et demander comment adapter la posologie.

CAS 2 : DYSTONIES CHEZ UN PATIENT DYSTONIQUE CONNU. 

Le titre est trompeur. Pour que la situation relève de l'urgence il ne suffit pas que ces dystonies soient présentes, mais qu'elle prennent un caractère envahissant et diffus. On parle de crise dystonique ou d'orage dystonique.

Comme souvent en pathologie neurolo, tout et n'importe quoi peut déclencher ces épisodes graves qui peuvent engager le pronostic vital.

En pratique il faut :

  1. Essayer d'avoir plusieurs voies d'abord. En raison des mouvements dystoniques ces voies peuvent être arrachées. 
  2. Bien hydrater. 
  3. Commencer par essayer du TRIHEXYPHENIDYL (ARTANE) IM en commençant à 5 mg (1/2 ampoule). Attention c'est une utilisation hors A.M.M. 
  4. En cas d'échec ou de non disponibilité, proposer du BACLOFENE 10mg PO. Tout le problème réside dans la galénique per os chez un patient dystonique : il existe du BACLOFENE injectable mais il est réservé à la voie intrathécale. Utiliser cette galénique en IV relève du choix d'un réanimateur. 
  5. En cas d'échec ou d'indisponibilité, il est possible d'envisager les BENZODIAZEPINES mais avec prudence car cette classe peut majorer les troubles moteurs. 
CAS 3 : AGITATION PSYCHOMOTRICE ET DYSTONIES CHEZ UN PATIENT AVEC UN SYNDROME DE GILLES DE LA TOURETTE. 

C'est une majoration brutale des symptômes avec des tics marqués pouvant, lorsqu'ils se manifestent sous la forme de mouvements dystoniques cervicaux, provoquer de véritables myélopathies traumatiques.

Il n'y a pas de traitement réellement efficace et on peut proposer en fonction de ce qui est disponible, de la TETRABENAZINE (XENAZINE), du TOPIRAMATE (EPITOMAX) et des injections de toxine botulinique.

CAS 4 : CHORÉE APRES UNE INFECTION STREPTOCOCCIQUE. 

C'est la fameuse Chorée de Sydenham. En général l'apparition du syndrome choréique est lentement progressive sur plusieurs semaines. Il existe cependant des variantes où la chorée est d'installation rapide et s'associe à une hypotonie (comme dans toutes les chorées) majeure pouvant induire une tétra parésie (ben oui, pour avoir de la force il faut un minimum de tonus musculaire). Ce tableau s'accompagne de troubles de la déglutition avec un risque réel de fausse routes. Le tableau est taquin car il peut mimer un syndrome de Guillain et Barré si ce n'est qu'il y a des mouvements choréiques. Cependant rassurez-vous, dans une situation d'urgence le traitement est le même avec des perfusions d'immunoglobulines IV.(2).

CAS 5 : HEMIBALLISME BRUTAL

Grande urgence neurologique se manifestant comme son nom l'indique par un hemiballsime. Impossible à rater : des patients qui donnent des grands coups dans le vide qui les emportent dans leur mouvement et les fait chuter, ça ne passe pas inaperçu. Ce syndrome traduit une lésion aiguë des noyaux gris centraux. La cause la plus fréquente est l'AVC puis l'hyperglycémie sans cétose, la toxoplasmose, la SEP et le syndrome des anticorps anti phospholipides et anti cardiolipines.

Ici l'urgence est de trouver la cause avec une IRM immédiate (comme pour un AVC)….en ayant quand même pris le temps de sédater votre patient pour éviter qu'il ne casse le jouet du radiologue avec ses grands coups de poings.

En dehors du traitement étiologique, le traitement symptomatique passe par l'utilisation des neuroleptiques comme la RISPERDONE ou de leur équivalent comme la TETRABENAZINE (2)

BONUS POUR FRIMER EN SOCIÉTÉ

Gilles de la Tourette. Vous le connaissez tous à cause de la maladie à laquelle il a laissé son nom. Cependant sa vie est tout aussi intéressante. Il appartient à la génération des élèves de Charcot. Il a donc travaillé sur l'hystérie (comme Charcot) sur l'hypnose (comme Charcot) et sur les conditions d'hospitalisation (pas comme Charcot). A l'époque il a fait la une de l'actualité en raison d'une patiente qui a tenté de le tuer par balles avec comme "excuse" un ordre donné sous hypnose. L’événement est si important (est-il possible d'induire un comportement meurtrier par hypnose ?) que les détails de l'attentat sont relatés dans la revue "le progrès médical", série 02 tome 18, page 446" (1).

Vous allez voir, à l'époque on savait écrire:

"…Ce jour-là se présentait à lui une femme d'aspect convenable…[il la reçoit] et elle lui expose qu'elle a déjà été hypnotisée par divers praticiens, qu'elle est actuellement sans ressources, et qu'elle a besoin de 50 francs [environ 200 euros]. Ne la connaissant nullement, ou du moins se rappelant à peine vaguement qu'elle s'était déjà présentée une fois pour lui rapporter des élucubration quelconques sur l'hypnotisme, M. Gilles de la Tourette la prie de donner son nom et son adresse promettant de lui faire parvenir un secours si sa situation était digne d'intérêt [il la raccompagne dehors et se retourne dans son cabinet]. A ce moment il reçoit un choc violent dans la nuque et entend [trois] détonations. Il palpe sa nuque qui ruisselait de sang et où il constata la présence entre l'os et la peau d'un corps dur [une balle]…" 

L'article continue en expliquant que les journaux de l'époque, s'excitent sur la possibilité de "crimes par suggestions hypnotiques". La réalité selon l'auteur étant que la femme en question était une "ancienne pensionnaire de Sainte-Anne aliénée" persécutée, ayant des hallucinations. L'auteur conclu avec cette phrase "il n'en est pas moins vrai que, si les choses de l'hypnotisme n'étaient pas si légèrement vulgarisée, les esprit faibles ne s'en empareraient pas pour en faire le sujet d'idées de persécution".

Si vous voulez en savoir plus, cet article fait partie de la collection suivante :
Parkinson et Pathologies du mouvement

et dans la collection
Urgences.




REFERENCES

(1) http://www2.biusante.parisdescartes.fr/livanc/index.las?cote=90170x1893x02x18&p=472&do=page
(2) Treatment of movement disorder emrgencies - Neurotherapeutics (2014) 11:208–212