6.8.15

Syndrome malin des neuroleptiques




syndrome malin des neuroleptiques en urgence neurologique.




DE QUOI PARLE-T-ON ? 

Des conséquences d'une intoxication aux neuroleptiques OU (et ce ou est essentiel car on l'oublie souvent), des conséquences d'une déplétion en dopaminergique.

Cela concerne tous les neuroleptiques, même les atypiques qui en théorie n'en donnent pas. Son incidence est faible (3% chez les patients traités) mais peut entraîner le décès dans 22% des cas. Il se manifeste par un syndrome extra-pyramidal à prédominance akinéto-rigide associé à une hyperthermie sans syndrome infectieux. 

QUAND FAUT-IL Y PENSER ?

Chez toute personne qui prend un agent neuroleptique. Quand on dit tous les neuroleptiques, cela inclut :
  • ceux qui sont cachés comme la SERTRALINE (ZOLOFT), le METOCLOPRAMIDE (PRIMEPRAN)
  •  ainsi que ceux qui, associés à des neuroleptiques, potentialisent leur effets sans en être eux-mêmes comme le LITHIUM, le DONEPEZIL ou les IRS (tous) 
  • ou encore les dépléteurs dopaminergiques comme la RESERPINE (TENSIONORME) ou la TETRABENAZINE (XENAZINE) 
Et qui présente brutalement (en général dans les 24-48 heures, même si le syndrome peut survenir chez des patients traités au long cours) un tableau associant une altération générale, des troubles du mouvements et une hyperthermie.

Comme souvent dans ces pathologies, tous les symptômes ne sont pas toujours présents simultanément et il existe un nombre important de tableaux incomplets. Il existe des critères diagnostiques mais aucun n'est reconnu universellement.

Pour synthétiser ces critères, il faut y penser devant au moins deux signes parmi les suivants :
  • Rigidité musculaire 
  • Fièvre 
  • Exposition à un neuroleptique ou arrêt brutal d'un traitement dopaminergique 
Et au moins deux autres parmi
  • Tachycardie 
  • Tension artérielle labile 
  • Incontinence urinaire 
  • Elévation des CPK 
  • Hypersudation 
Si vous voulez quelque chose de plus structuré, le dernier score en date (Gurrera 2011) (1) est référencé à la fin de ce chapitre.

COMMENT LE CONFIRMER ?

Il n'y a pas de signe pathognomonique. Vous le confirmerez en éliminant les diagnostics différentiels dont :
  • Le syndrome sérotoninergique (un clone quasi parfait) qui survient sur des terrains proches mais où la confusion, les mycoclonies et la dysautonomie sont marqués (voir tableau comparatif dans le chapitre syndrome sérotoninergique http://etunpeudeneurologie.blogspot.fr/2015/06/syndrome-serotoninergique.html). 
  • Les infections. Ce qui implique de réaliser une NFS, une BU, une ECBU, une radio pulmonaire et une PL (et donc une imagerie cérébrale pour pourvoir faire la PL. A ce propos sachez que la seule situation où vous pouvez vous passer d'une imagerie cérébrale avant PL sans qu'on ne vous reproche les éventuelles complications du geste est le purpura fulminans. Si le radiologue vous demande ce que vous cherchez, répondez lui que toute confusion fébrile doit faire éliminer entre un abcès cérébral ou une hémorragie méningée, et qu'aucune PL ne doit être pratiquée tant qu'une éventuelle compression ventriculaire n'a pas été éliminée - Si le radiologue persiste à vous taquiner, sortez lui le guide des "urgences radiologiques de l'adulte édité par le société française de radiologie - page 6 -http://www.sfrnet.org/data/upload/files/a7e7222e420ac736c1256b6c0044cb07/14668_urgence_adulte.pdf
  • Le syndrome de sevrage en traitement dopaminergique chez un patient parkinsonien. 
COMMENT LE TRAITER ?
  • C'est une urgence médicale avec un engagement du pronostic vital. 
  • L'antagonisation des neuroleptiques par des dopaminergiques n'est pas efficace. 
  • Les traitements sont donc purement symptomatiques 
  • Hydratation en IV (sachant que dans les référentiels anglo-saxons il est proposé d'alcaliniser les urines) 
  • Administrer un anti spastique comme de la BROMOCRIPTINE 5 à 10 mg 3 fois par jour ou du DANTROLENE 2,5 mg/kg 4 fois par jour. 
  • Réintroduire les agoniste dopaminergiques en cas de syndrome malin lié au sevrage ( voir chapitre Maladie de Parkinson et akinésie aigue) 
Et si votre patient s'en sort (ce qui peut mettre entre 10 et 15 jours), il faut rediscuter l'indication des neuroleptiques. Ça n'est évidemment pas facile car il y a rarement des alternatives, mais le risque de récidive après un premier événement est estimé entre 35 et 70%

BONUS POUR FRIMER EN SOCIETE

*- La RESERPINE se trouve à l'état naturel dans les racines d'une plante indienne nommée Rawvolfia serpentina. Si vous n'en avez jamais entenud parler c'est normal car ça ne pousse que dans le sous-continent indien et en Indonésie. Dans ces pays, la médecine traditionnelle ayurvédique l'utilisée comme antihypertenseur (comme le TENSIONORME), et contre les maladies mentales (ça tombe bien puisque son effet dépleteur dopaminergique l'apparente à un neuroleptique). 
Son utilisation en France sous forme de racine n'est pas autorisée mais elle peut parfois se retrouver via l'import par le net ou par l'import direct en revenant de vacances. L'intoxication avec été racine donne un tableau très proche du syndrome malin des neuroleptiques sauf la tachycardie qui peut être remplacée par une bradycardie. Il faut savoir que les racines de Rawvolfia contiennent autre molécule : l'AJMALINE connue en France sous le nom de RAUBASINE. L'AJMALINE est un agent anti arythmique de classe I qui n'est plus utilisé en France (c'etiat un des principes actif de l'ISKEDYL), mais tout comme la RESERPINE, il est encore disponible en médecine indienne.

REFERENCES

(1) Gurrera RJ, Caroff SN, Cohen, A, et al. An international consensus study of neuroleptic malignant syndrome diagnostic criteria using the Delphi model. J Clinic Psychiatry 2011;72(9):1222-8.

Si vous voulez en savoir plus, cet article fait partie de la collection suivante :
Parkinson et Pathologies du mouvement

et dans la collection
Urgences.

ainsi que dans la collection
Pharmacologie et thérapeutique