Monsieur Y, 79 ans a une maladie de Parkinson depuis 14 ans. Il vit dans une E.H.P.A.D. depuis 3 ans. Son admission dans cet établissement a été rendu nécessaire par une invalidité progressive de sa maladie, ne permettant plus un suivi à son domicile (maison isolée avec escaliers). Monsieur Y est veuf et a une fille qui vit à plus de 500 km.
Monsieur Y est au stade des fluctuations motrices de sa maladie de Parkinson. Habituellement, il se lève le matin vers 7h et prend immédiatement du MODOPAR 125 mg gélule et un comprimé de REQUIP LP 4mg. Il est akinétique et tremblant jusqu'à 10 heures. Il se décoince ensuite jusqu'à midi où il prend un 2éme MODOPAR 125 mg gélule. Entre 12h et 14h heures il est progressivement de nouveau akinétique. A 14h il prend un 3éme MODOPAR 125mg gélule qui n'est pas très efficace. A 17h il prend un 4 éme MODOPAR qui pour le coup est décrit comme très efficace, par le patient, mais les IDE qui s'occupent de lui n'en sont pas persuadés : il marche mieux, mais les tremblements sont beaucoup plus amples, ce qui le déstabilise et provoque des contusions à cause de coups qu'il inflige involontairement au mobilier.
Depuis un mois, il va beaucoup moins bien. Au début son ses périodes de tremblements ont augmenté, le matin, il avait du mal à se lever et faire sa toilette. Il est noté qu'il est devenu anorexique, ses plateaux repas étant à peine entamés.
Son médecin traitant est venu le voir, et a augmenté le REQUIP (2mg + 4mg). Ceci n'a pas modifié son état moteur, mais il est devenu plus agité, agressifs, parfois violent.
Il a été revu par son médecin 5 jours plus tard, qui est diminué les REQUIP à la dose antérieure. Cependant, les choses ont continué à se dégrader, avec une grabatisation de plus en plus marquée le matin, une majoration de son agressivité et des hallucinations l'après-midi.
Le médecin instaure un traitement par RISPERDAL ORO 1mg à midi. Le soir même il est rappelé par les aides soignantes, monsieur Y est complètement bloqué, ne peut avaler ses traitements et ne peut être mobilisé.
Monsieur Y est transféré aux urgences. L'examen clinique confirme une grosse akinésie, des troubles de la déglutition. L'urgentiste note également qu'il est aphasique. Le reste de l'examen clinique est décrit comme normal. La bio est normale (ni anomalie de NFS ni syndrome inflammatoire), la BU montre 2 croix de sang, 1 croix de nitrites, 1 croix de sang. L'ECG est normal, le scan cérébral non injecté est normal. Il est équipé d'une voie avec du G5%, de l'aspirine 250 mg IV dans l'hypothèse d'un AVC. Ses autres traitements sont interrompus.
On le récupère et après 15 jours il ressort en pleine forme, mais ça c'est une autre histoire.
MAINTENANT, CAUSONS :
je vous propose un certain nombre question, vous laisse y réfléchir et, pour ceux qui le souhaitent, répondre soit par twitter à @qffwffq ou dans les commentaires du blog, (POUR FAIRE SIMPLE FAITES COMME AU RESTO CHINOIS DONNEZ JUSTE LE NUMÉRO DE LA QUESTION A LAQUELLE VOUS VOULEZ RÉPONDRE).
- Monsieur Y a-t-il raison d'avoir 79 ans ?
- Avant son événement actuel, que penser de son traitement de fond en terme d'efficacité : je précise la question : est-il sous dosé (excès akinésies), normo dosé (on ne peut pas faire mieux) ou sur dosé (excès de mouvements)
- Comment expliquer le constat des IDE : à 17h il sent mieux, il marche mieux, mais objectivement, il tremble plus et il se cogne partout ?
- Comment expliquer l'anorexie (pour les IDE, la réponse à cette question est essentielle) ?
- Le médecin a-t-il eu raison d'augmenter le REQUIP ?
- Le médecin a-t-il eu raison de diminuer le REQUIP ?
- Comment expliquer les hallucinations ?
- Que penser de la prescription de RISPERDAL ?
- Comment expliquer la paralysie complète et les troubles de la déglutition ?
- Quelle est la cause de ce qui lui arrive ?
- Que penser des prescriptions es urgences ?
- En sortant de chez nous quelle consigne spécifique pour les IDE (dans l'exercice du rôle propre).
- À votre avis quels traitements avons nous proposés
- Dans une situation identique, quel traitement, le médecin aurait-il du avoir avec lui ?
- SI par la suite, il devient psychotique (ce qui arrive dans le Park) quel traitement proposer ?
- Pour ou contre Derrick dans les E.H.P.A.D ?
RÉSULTATS
Vous avez de nouveau participé en masse (si si, n'ayant pas peur des mots, à ma petite échelle, ça fait des masses). Par contre, question réponses, ça a été beaucoup plus timide sur le blog. Sur Twitter, j'ai reçu 11 réponses complètes et environ 30 incomplètes. Bravo à ceux qui ont joué le jeu. Ceux qui ont été intimidés par le Parkinson verront que les réponses que je propose ne sont pas si originales que cela.
Dernier rappel, ce cas clinique est réel et je n'ai pas plus d'infos que vous. Les réponses que je vous propose sont les miennes, elles ne sont pas une vérité absolue, juste une opinion.
En 2012, la haute autorité de santé a publié un guide complet, simple, détaillé et... Qui se garde bien d'aborder frontalement la question du traitement. Vous ne le trouverez qu'en annexe 5, page 78 sur 88. Ne vous en étonnez pas. Le traitement initial de la maladie de Parkinson est l'objet de débat houleux entre neurologues. La H.A.S. aimerait bien se prononcer, mais ne réussit pas à réunir une conférence de consensus consensuelle. Cela étant impossible pour l'instant, elle est obligée de rester sur les recommandations de la dernière, qui date de 2002.
Voici le lien vers ce guide :
http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2012-04/guide_parcours_de_soins_parkinson.pdf
1- Monsieur Y a-t-il raison d'avoir 79 ans ?
OUI. Ça nous permet de ne pas tomber dans les problèmes byzantins du traitement chez le sujet de moins de 60 ans. Par contre, dans une maladie de Parkinson, le facteur pronostic essentiel, n'est pas l'âge du patient, mais la durée d'évolution de la maladie. Les complications invalidantes, handicapantes, surviennent pares les dix premières années de traitement. Il faut savoir, qu'en 2014, malgré tous les progrès thérapeutiques, les solutions médicamenteuses sont ridiculement limitées pour tous ces patients, en fin de lune de leur traitement par L-Dopa.
2- Avant son événement actuel, que penser de son traitement de fond en terme d'efficacité : je précise la question : est-il sous dosé (excès akinésies), normo dosé (on ne peut pas faire mieux) ou sur dosé (excès de mouvements)
LES 3. Et c'est tout le problème. Au stade des fluctuations motrices, les parkinsoniens, ont un état moteur qui peut être normal (nommé état ON), bloqué (état OFF), ou excessivement mobile (état DYS, pour Dyskinésies). Vous avez déjà dû entendre vaguement ces termes sans trop comprendre pourquoi on insistait tant dessus.Je vais essayer de vous montrer que c'est essentiel pour tous, médecin, IDE, kinés etc.
Petit rappel : comme le diabétique dont le problème est une carence en insuline, le parkinsonien est carencé en Dopamine. La Dopamine a deux fonctions essentielles dans le cerveau :
En début de maladie, les traitements maintiennent un taux cérébral de Dopa satisfaisant, mais après dix ans, le traitement commence a avoir un effet instable dans le temps. Au cours de la même journée, et pendant la durée d'effet théorique de la L-Dopa, les patients ressentent une insuffisance (les OFF),un état normale (le ON), un excès d'effet (les DYS), puis une descente (retour vers le OFF). Dans le cas de Monsieur Y, il est visiblement en OFF jusqu'à 10 heures, en ON de 10h à 12h, de nouveau en OFF de 12 à 17h, en ON puis en DYS de 17h jusqu'au soir.
3- Comment expliquer le constat des IDE : à 17h il sent mieux, il marche mieux, mais objectivement, il tremble plus et il se cogne partout ?
Précisons d'abord que les IDE qui ont noté ceci dans le dossier ont fait preuve d'une grande finesse clinique qui est tout à leur honneur : pas besoin de connaissances neuros pour faire des observations justes et utiles. Il est probable que si les médecins de monsieur Y avaient pris la peine de lire ces notes, le traitement aurait été bien plus adapté.
Ce que les IDE constatent est le phénomène des DYSKINESIES : Monsieur Y est surdosé. L'effet moteur est donc un excès de mouvements qui n'ont rien à voir avec les tremblements, mais avec des mouvements amples, violents, incontrôlés, responsables de contusions du fait des coups portés involontairement aux meubles. Ils ressemblent à une dance (version techno hard core) d'ou le nom de chorées. Et étonnement, les patients ne s'en plaignent que rarement, voir jamais. L'explication est simple, ils sont également en excès de stimulation de leur circuit du plaisir et de la récompense, ce qui provoque chez eux, malgré les coups, une sensation de bien être.
4- Comment expliquer l'anorexie (pour les IDE, la réponse à cette question est essentielle) ?
RÉPONSE ESSENTIELLE: attention ceci est ma minute spéciale culpabilisation et donneur de leçons, mais j'assume. Une fois de plus l'observation clinique IDE est fine : il ne finit pas ses plateaux repas. Mais en quoi ceci traduit-il une anorexie ? Les parkinsoniens, sous dosés en L Dopa, sont lent, très lents, très très lent, en plus, en OFF il ne peuvent pas déglutir ! Les plateaux repas non termines sont un signe d'alerte essentiel, ils traduisent une inefficacité anormale du traitement : pour un parkinsonien, et je pèse mes mots, ceci est aussi grave qu'une douleur thoracique chez un sujet cardiaque, une orthopnée chez l'asthmatique ou un malaise chez le diabétique. Un mois dans cet état est de la maltraitance et de la non-assistance !!!
Maltraitance !
Non-assistance !
Je prends mes gouttes et on passe à la question suivante !
5- Le médecin a-t-il eu raison d'augmenter le REQUIP ?
NON. Même si on peut essayer de comprendre son raisonnement. Il a certainement du se dire que le patient n'était plus assez traité et qu'il fallait augmenter la stimulation dopaminergique. La L-Dopa faisant souvent peur, et le REQUIP semblant plus facial à manier, il a choisi cette solution. Pas de bol, c'était le mauvais choix. Premièrement : TOUT PARKINSONIEN QUI SE DÉCOMPENSE BRUTALEMENT EST INFECTE DE QUELQUE PART JUSQU'À PREUVE DU CONTRAIRE. Deuxièmement, si vous n'avez rien trouvé, recommencez. Troisièmement, s'il faut adapter le traitement, et qu'on est par neurologue, il faut réfléchir comme pour les diabétiques : quand un diabétique devient instable, vous rajouter pas un antidiabétique oral, mais vous adaptez plus finement insulinothérapie ! Et bien là pareil, vous enlevez l'agoniste dopaminergique et adaptez le MODOPAR.
6- Le médecin a-t-il eu raison de diminuer le REQUIP ?
Oui, mais c'est déjà trop tard.
7- Comment expliquer les hallucinations ?
Un cocaïnomane, quand il se charge en coke, a un délire avec des hallucinations avec une thématique paranoïde. Et bien là pareil ! Le traitement de Monsieur Y a atteint un tel niveau de déséquilibre, qu'il a des relargages intempestifs de Dopamine dans le cerveau qui donnent des hallucinations
8- Que penser de la prescription de RISPERDAL ?
C'EST LE MAL ! Pourquoi donne-on des neuroleptiques aux hallucinés ? Parce que les neuroleptiques sont de fabuleux anti hallucinatoires anti psychotiques ! Pourquoi marchent-ils si bien ? Parce que ce sont des antagonistes Dopaminergiques ! Et que ne doit-on jamais antagoniser chez un patient dont maladie est liée à une carence en Dopamine , LA DOPAMINE !
S'il faut vraiment faire quelque chose, c'est diminuer un peu le traitement par L-Dopa (casse-gueule dans ce contexte), ou introduire de la CLOZAPINE, seul neuroleptique autorisé chez eux. En cas d'effets secondaires sous CLOZAPINE (ça flingue les lymphos), on utilise parfois la QUIETAPINE, mais avec une efficacité bien moindre.
9- Comment expliquer la paralysie complète et les troubles de la déglutition ?
État de OFF sévère, c'est une urgence vitale !
10- Quelle est la cause de ce qui lui arrive ?
L'infection urinaire, toute bête. Puis la désadaptation du traitement, puis les neuroleptiques : on est plus dans la iatrogènie qu'autre chose.
11- Que penser des prescriptions des urgences ?
AAAARGJHHHHH. Jamais de Glucosé en neuro ! Jamais de diagnostic d'AVC au pif surtout si atypique ! ET SURTOUT, QUI PENSERAIT A ARRÊTER L'INSULINE D'UN DIABÉTIQUE EN COMA HYPER OSMOLAIRE ???? Et bien là pareil : on ne prive jamais un Parkinsonien de Dopa, JAMAIS, JAMAIS !
Bon visiblement, je n'ai pas pris assez de gouttes, j'en reprends et on passe à la suite..
12- En sortant de chez nous quelle consigne spécifique pour les IDE (dans l'exercice du rôle propre).
Continuer ce qu'elles ont super bien fait en terme d'observation clinique : noter les fluctuations motrices, noter les troubles du comportement en particulier les hallucinations ou les épisodes dépressifs, noter l'alimentation et mesure le poids. Dans cette histoire, je le répète, si quelqu'un avait pris la peine de lire les observations IDE, on n'en serait probablement pas arrivés là.
13- À votre avis quels traitements avons-nous proposés ?
A part les antibiotiques pour traiter l'infection urinaire, on a fractionné la L-Dopa et viré les autres traitements. Monsieur Y est ressorti avec des doses variables de MODOPAR toutes les deux heures.
13- Dans une situation identique, quel traitement, le médecin aurait-il du avoir avec lui ?
Quand un Parkinsonien ne peut plus avaler il est en danger de mort (pour de vrai, ce n'est pas une image ou le manque de gouttes), car il ne peut plus prendre de L-Dopa. Malheureusement, le l-Dopa n'existe qu'en forme per os. La seule façon de s'en sorti, c'est un agoniste Dopaminergique, qui a un délais d'action très bref (10 minutes) et une durée d'action tout aussi brève (20 minutes) : c'est l'APOMORPHINE (rien à voir avec de a MORPHINE). De la même façon que tout diabétique doit avoir à la maison un stylo d'insuline, tous Parkinsonien évolué doit avoir à la maison un stylo d'Apomorphine et le son entourage doit être formé à son utilisation.
14- SI par la suite, il devient psychotique (ce qui arrive dans le Park) quel traitement proposer ?
Un seul neuroleptique : la CLOZAPINE
15- Pour ou contre Derrick dans les E.H.P.A.D ?
CONTRE : je suis d'accord avec Estelle de Pélichy, ils feraient mieux de faire du sport.
Et puisque j'ai eu dans les réponses sur Twitter, un résumé bien meilleur que le mien, voici ce qu'a répondu @TitBouchon :
Vous avez de nouveau participé en masse (si si, n'ayant pas peur des mots, à ma petite échelle, ça fait des masses). Par contre, question réponses, ça a été beaucoup plus timide sur le blog. Sur Twitter, j'ai reçu 11 réponses complètes et environ 30 incomplètes. Bravo à ceux qui ont joué le jeu. Ceux qui ont été intimidés par le Parkinson verront que les réponses que je propose ne sont pas si originales que cela.
Dernier rappel, ce cas clinique est réel et je n'ai pas plus d'infos que vous. Les réponses que je vous propose sont les miennes, elles ne sont pas une vérité absolue, juste une opinion.
En 2012, la haute autorité de santé a publié un guide complet, simple, détaillé et... Qui se garde bien d'aborder frontalement la question du traitement. Vous ne le trouverez qu'en annexe 5, page 78 sur 88. Ne vous en étonnez pas. Le traitement initial de la maladie de Parkinson est l'objet de débat houleux entre neurologues. La H.A.S. aimerait bien se prononcer, mais ne réussit pas à réunir une conférence de consensus consensuelle. Cela étant impossible pour l'instant, elle est obligée de rester sur les recommandations de la dernière, qui date de 2002.
Voici le lien vers ce guide :
http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2012-04/guide_parcours_de_soins_parkinson.pdf
1- Monsieur Y a-t-il raison d'avoir 79 ans ?
OUI. Ça nous permet de ne pas tomber dans les problèmes byzantins du traitement chez le sujet de moins de 60 ans. Par contre, dans une maladie de Parkinson, le facteur pronostic essentiel, n'est pas l'âge du patient, mais la durée d'évolution de la maladie. Les complications invalidantes, handicapantes, surviennent pares les dix premières années de traitement. Il faut savoir, qu'en 2014, malgré tous les progrès thérapeutiques, les solutions médicamenteuses sont ridiculement limitées pour tous ces patients, en fin de lune de leur traitement par L-Dopa.
2- Avant son événement actuel, que penser de son traitement de fond en terme d'efficacité : je précise la question : est-il sous dosé (excès akinésies), normo dosé (on ne peut pas faire mieux) ou sur dosé (excès de mouvements)
LES 3. Et c'est tout le problème. Au stade des fluctuations motrices, les parkinsoniens, ont un état moteur qui peut être normal (nommé état ON), bloqué (état OFF), ou excessivement mobile (état DYS, pour Dyskinésies). Vous avez déjà dû entendre vaguement ces termes sans trop comprendre pourquoi on insistait tant dessus.Je vais essayer de vous montrer que c'est essentiel pour tous, médecin, IDE, kinés etc.
Petit rappel : comme le diabétique dont le problème est une carence en insuline, le parkinsonien est carencé en Dopamine. La Dopamine a deux fonctions essentielles dans le cerveau :
- C'est le neurotransmetteur qui permet le fonctionnement des noyaux gris centraux. Je ne vais pas vous faire un cours sur la voie motrice, mais les curieux trouveront les détails ici http://etunpeudeneurologie.blogspot.fr/2013/11/la-voie-motrice-votre-cerveau.html mais en bref, sans Dopa, les patients sont comme grippés : ils peuvent bouger, mais ces mouvement sont lents, avec des à coup, parfois associé à des tremblements (et oui, le tremblement n'est pas le principal signe du Parkinson). Au maximum de carence, ils peuvent être statufiés, incapable de tenir debout, de bouger, de parler ou d'avaler. S'ils ont des tremblements, les deux phénomènes s'additionnent ce qui aboutit à la paralysie tremblante telle que décrit par James Parkinson en 1817 ( http://fr.wikipedia.org/wiki/James_Parkinson).
- C'est également le neurotransmetteur des circuits du plaisir et de la récompense. Pour faire simple, la Dopamine a un effet cocaïne like : si elle vient à manquer, les Parkinsonien sont en manque, abattus, déprimes, parfois suicidaires. Si elle est présente en excès, les Parkinsoniens ont une sensation de bien être, parfois une euphorie avec une sensation de toute puissance.
En début de maladie, les traitements maintiennent un taux cérébral de Dopa satisfaisant, mais après dix ans, le traitement commence a avoir un effet instable dans le temps. Au cours de la même journée, et pendant la durée d'effet théorique de la L-Dopa, les patients ressentent une insuffisance (les OFF),un état normale (le ON), un excès d'effet (les DYS), puis une descente (retour vers le OFF). Dans le cas de Monsieur Y, il est visiblement en OFF jusqu'à 10 heures, en ON de 10h à 12h, de nouveau en OFF de 12 à 17h, en ON puis en DYS de 17h jusqu'au soir.
3- Comment expliquer le constat des IDE : à 17h il sent mieux, il marche mieux, mais objectivement, il tremble plus et il se cogne partout ?
Précisons d'abord que les IDE qui ont noté ceci dans le dossier ont fait preuve d'une grande finesse clinique qui est tout à leur honneur : pas besoin de connaissances neuros pour faire des observations justes et utiles. Il est probable que si les médecins de monsieur Y avaient pris la peine de lire ces notes, le traitement aurait été bien plus adapté.
Ce que les IDE constatent est le phénomène des DYSKINESIES : Monsieur Y est surdosé. L'effet moteur est donc un excès de mouvements qui n'ont rien à voir avec les tremblements, mais avec des mouvements amples, violents, incontrôlés, responsables de contusions du fait des coups portés involontairement aux meubles. Ils ressemblent à une dance (version techno hard core) d'ou le nom de chorées. Et étonnement, les patients ne s'en plaignent que rarement, voir jamais. L'explication est simple, ils sont également en excès de stimulation de leur circuit du plaisir et de la récompense, ce qui provoque chez eux, malgré les coups, une sensation de bien être.
4- Comment expliquer l'anorexie (pour les IDE, la réponse à cette question est essentielle) ?
RÉPONSE ESSENTIELLE: attention ceci est ma minute spéciale culpabilisation et donneur de leçons, mais j'assume. Une fois de plus l'observation clinique IDE est fine : il ne finit pas ses plateaux repas. Mais en quoi ceci traduit-il une anorexie ? Les parkinsoniens, sous dosés en L Dopa, sont lent, très lents, très très lent, en plus, en OFF il ne peuvent pas déglutir ! Les plateaux repas non termines sont un signe d'alerte essentiel, ils traduisent une inefficacité anormale du traitement : pour un parkinsonien, et je pèse mes mots, ceci est aussi grave qu'une douleur thoracique chez un sujet cardiaque, une orthopnée chez l'asthmatique ou un malaise chez le diabétique. Un mois dans cet état est de la maltraitance et de la non-assistance !!!
Maltraitance !
Non-assistance !
Je prends mes gouttes et on passe à la question suivante !
5- Le médecin a-t-il eu raison d'augmenter le REQUIP ?
NON. Même si on peut essayer de comprendre son raisonnement. Il a certainement du se dire que le patient n'était plus assez traité et qu'il fallait augmenter la stimulation dopaminergique. La L-Dopa faisant souvent peur, et le REQUIP semblant plus facial à manier, il a choisi cette solution. Pas de bol, c'était le mauvais choix. Premièrement : TOUT PARKINSONIEN QUI SE DÉCOMPENSE BRUTALEMENT EST INFECTE DE QUELQUE PART JUSQU'À PREUVE DU CONTRAIRE. Deuxièmement, si vous n'avez rien trouvé, recommencez. Troisièmement, s'il faut adapter le traitement, et qu'on est par neurologue, il faut réfléchir comme pour les diabétiques : quand un diabétique devient instable, vous rajouter pas un antidiabétique oral, mais vous adaptez plus finement insulinothérapie ! Et bien là pareil, vous enlevez l'agoniste dopaminergique et adaptez le MODOPAR.
6- Le médecin a-t-il eu raison de diminuer le REQUIP ?
Oui, mais c'est déjà trop tard.
7- Comment expliquer les hallucinations ?
Un cocaïnomane, quand il se charge en coke, a un délire avec des hallucinations avec une thématique paranoïde. Et bien là pareil ! Le traitement de Monsieur Y a atteint un tel niveau de déséquilibre, qu'il a des relargages intempestifs de Dopamine dans le cerveau qui donnent des hallucinations
8- Que penser de la prescription de RISPERDAL ?
C'EST LE MAL ! Pourquoi donne-on des neuroleptiques aux hallucinés ? Parce que les neuroleptiques sont de fabuleux anti hallucinatoires anti psychotiques ! Pourquoi marchent-ils si bien ? Parce que ce sont des antagonistes Dopaminergiques ! Et que ne doit-on jamais antagoniser chez un patient dont maladie est liée à une carence en Dopamine , LA DOPAMINE !
S'il faut vraiment faire quelque chose, c'est diminuer un peu le traitement par L-Dopa (casse-gueule dans ce contexte), ou introduire de la CLOZAPINE, seul neuroleptique autorisé chez eux. En cas d'effets secondaires sous CLOZAPINE (ça flingue les lymphos), on utilise parfois la QUIETAPINE, mais avec une efficacité bien moindre.
9- Comment expliquer la paralysie complète et les troubles de la déglutition ?
État de OFF sévère, c'est une urgence vitale !
10- Quelle est la cause de ce qui lui arrive ?
L'infection urinaire, toute bête. Puis la désadaptation du traitement, puis les neuroleptiques : on est plus dans la iatrogènie qu'autre chose.
11- Que penser des prescriptions des urgences ?
AAAARGJHHHHH. Jamais de Glucosé en neuro ! Jamais de diagnostic d'AVC au pif surtout si atypique ! ET SURTOUT, QUI PENSERAIT A ARRÊTER L'INSULINE D'UN DIABÉTIQUE EN COMA HYPER OSMOLAIRE ???? Et bien là pareil : on ne prive jamais un Parkinsonien de Dopa, JAMAIS, JAMAIS !
Bon visiblement, je n'ai pas pris assez de gouttes, j'en reprends et on passe à la suite..
12- En sortant de chez nous quelle consigne spécifique pour les IDE (dans l'exercice du rôle propre).
Continuer ce qu'elles ont super bien fait en terme d'observation clinique : noter les fluctuations motrices, noter les troubles du comportement en particulier les hallucinations ou les épisodes dépressifs, noter l'alimentation et mesure le poids. Dans cette histoire, je le répète, si quelqu'un avait pris la peine de lire les observations IDE, on n'en serait probablement pas arrivés là.
13- À votre avis quels traitements avons-nous proposés ?
A part les antibiotiques pour traiter l'infection urinaire, on a fractionné la L-Dopa et viré les autres traitements. Monsieur Y est ressorti avec des doses variables de MODOPAR toutes les deux heures.
13- Dans une situation identique, quel traitement, le médecin aurait-il du avoir avec lui ?
Quand un Parkinsonien ne peut plus avaler il est en danger de mort (pour de vrai, ce n'est pas une image ou le manque de gouttes), car il ne peut plus prendre de L-Dopa. Malheureusement, le l-Dopa n'existe qu'en forme per os. La seule façon de s'en sorti, c'est un agoniste Dopaminergique, qui a un délais d'action très bref (10 minutes) et une durée d'action tout aussi brève (20 minutes) : c'est l'APOMORPHINE (rien à voir avec de a MORPHINE). De la même façon que tout diabétique doit avoir à la maison un stylo d'insuline, tous Parkinsonien évolué doit avoir à la maison un stylo d'Apomorphine et le son entourage doit être formé à son utilisation.
14- SI par la suite, il devient psychotique (ce qui arrive dans le Park) quel traitement proposer ?
Un seul neuroleptique : la CLOZAPINE
15- Pour ou contre Derrick dans les E.H.P.A.D ?
CONTRE : je suis d'accord avec Estelle de Pélichy, ils feraient mieux de faire du sport.
Et puisque j'ai eu dans les réponses sur Twitter, un résumé bien meilleur que le mien, voici ce qu'a répondu @TitBouchon :
- JAMAIS de neuroleptiques (sauf CLOZAPINE instaurée par neuro ou psychiatre ou gériatre).
- Un Park qui décompense et un Park infecté jusqu'à preuve du contraire
- Les agonistes dopaminergiques au delà de 70 ans, c'est le mal
- On ne sèvre JAMAIS
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